La Perle évangélique
Jérôme Millon, coll. « Atopia », 1997, 730 p., 250 F

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Jan van RUUSBROEC
Ecrits III.
Le royaume des amants. Le miroir de la béatitude éternelle.
Prés. & trad. A. Louf. Bellefontaine, coll. "Spiritualité occidentale", 1997, 288 p, 115 F

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La « perle », le trésor enfoui dans le champ de l'âme et qui ne demande qu'à occuper toute la place, c'est Dieu lui-même. Ce thème central de la mystique rhéno-flamande fournit son titre à l'un des ouvrages du XVIe siècle dont l'influence sur les maîtres modernes fut considérable : Canfield, François de Sales, Bérulle en témoignent, pour ne pas parler des jésuites et d'Angelus Silesius. Moins célèbre que l'Imitation de Jésus-Christ, la Perle s'alimente elle aussi aux sources nordiques, comme l'oeuvre de Harphius dont elle est contemporaine. Comme Harphius, elle orchestre à sa manière les grands thèmes de la mystique du Nord, celle du « bon père Ruusbroec » notamment, sans recherche d'originalité ni d'ésotérisme, au contraire. Ainsi que l'écrit Nicolas Eschius, son éditeur et préfacier de 1545, l'auteur « a plutôt voulu mettre en lumière des choses pieuses et dévotes que doctes et fardées, pour autant principalement qu'il écrivait pour les simples ». Dès l'origine, on a entretenu l'anonymat de son auteur, comme pour l'Imitation. On sait seulement qu'il s'agit d'une béguine d'Oisterwijk, morte en 1540. La chartreuse de Cologne, haut lieu de diffusion en Europe de la mystique du Nord par ses traductions en latin du néerlandais et du moyen-haut allemand, en assura la publication, en néerlandais d'abord (1535), puis en latin (1545). Quand on sait que les premiers jésuites, Favre et Canisius notamment, mais aussi Ignace lui-même, étaient en relation étroite avec ce milieu mystique ; qu'en France la Perle fut traduite en 1602 par la chartreuse parisienne de Vauvert, dans la mouvance de dom Beaucousin, oracle du cercle Acarie, on mesure l'importance de cette petite somme qui témoigne de la diffusion de la mystique hors des cloîtres. Victime du discrédit dans lequel tomba la mystique au cours du XVIIe siècle, la traduction française n'avait jamais été rééditée.
Moins urgente apparemment était la nouvelle traduction de deux importants traités de Ruusbroec. Depuis l'entre-deux guerres, en effet, on disposait des oeuvres complètes du maître de Groenendaal en français, grâce aux bénédictins de Saint-Paul de Wisques. Mais on appréciera que se poursuive l'oeuvre de traduction à nouveaux frais entreprise par dom Louf. Ce troisième volume paru dans la collection de Bellefontaine présente le premier traité composé par le mystique brabançon, particulièrement intéressant pour ceux qui s'interrogent sur la possibilité d'une mystique « naturelle ». Le miroir de la béatitude éternelle, lui, développe, à l'intention d'une moniale, une mystique de l'Eucharistie qui connaîtra bien des échos dans la postérité. La traduction de dom Louf se signale par son parti pris de rigueur. Elle bénéficie, ainsi que ses introductions, des acquis récents dans le travail des textes et la connaissance du milieu.

Dominique Salin

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